Croatie

Les plus beaux villages de l’Istrie

Les plus beaux villages de l’Istrie

Partir à la découverte des plus beaux villages de l’Istrie, c’est aller le nez en l’air : ils occupent presque partout le sommet de collines ou de buttes, d’une falaise parfois. Ainsi, au nord de la péninsule, Groznjan, Oprtalj, Motovun et Hum ; ainsi, dans sa partie centrale, Beram et Sveti Lovrec ; ou, sur les côtes est et ouest, Brsec et Bale. Un collier de perles de calcaire médiévales et Renaissance, que le bleu du ciel, les tons variés de la campagne, le scintillement de l’Adriatique magnifient.

 

  1. Groznjan
  2. Oprtalj
  3. Motovun
  4. Hum
  5. Beram
  6. Sveti Lovrec
  7. Brsec
  8. Bale

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Groznjan

C’est sous l’empire Austro-Hongrois que Groznjan a connu son âge d’or. Un siècle entre la chute de Napoléon et la fin de la guerre de Quatorze, qui a vu le vieux village s’étoffer et écouler son huile d’olive, son vin, les produits de son élevage au-delà des frontières de l’Istrie. Le chemin de fer, établi en 1902, ayant encore facilité ce développement. Aujourd’hui, bien serré en poing au sommet de sa colline, il rappelle par ses maisons et ses édifices civils et religieux, une histoire longue et contrastée. La pierre donne beaucoup de cachet au bâti et au dallage des rues ; le temps l’a lustrée, patinée, adoucie. Nulle sévérité, elle donne le ton de la douceur de vivre. On est ici en zone tampon. D’ailleurs, la commune compte une moitié d’administrés parlant italien. Les frontières fluctuent, la collocation de la terre reste. Dans le village même, galeries et ateliers d’artiste ont permis à la vie sociale de se maintenir et de se renouveler. Amateurs et mélomanes profitant des expositions, concerts et festivals pour faire emplette de bonnes choses : les plaisirs convergent. Et Groznjan pétille.

village de Groznjan

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Oprtalj

Vignes et oliveraies font à Oprtalj un piédestal aux verts changeants. Et engageants. Peut-être est-ce dès lors par timidité, les impératifs militaires n’ont qu’un temps, que le petit bourg n’a pas débordé ses remparts. Il reste derrière, à l’abri des curiosités intempestives. On l’y trouve donc tel qu’en lui-même, doté de quelques maisons médiévales et de quelques autres Renaissance. L’église dresse vers un ciel volontiers bleu une tour puissante sans extravagance. Pour entrer dans un paysage, il faut de la mesure. Ce dont Oprtalj ne se départ pas. L’Italie voisine semble avoir fourni à tout ça, sinon un modèle, du moins une inspiration. Nous ne reportons pas un charme à un autre, nous suivons un état d’âme. Ainsi, lorsqu’un promeneur découvre la ravissante fresque de l’Annonciation - XVe siècle - de la chiesa di Santa Maria, au pied de la colline, il ne peut s’empêcher de penser à ce qu’il a pu voir de l’autre côté de l’Adriatique. Ce qui n’est rien enlever à l’Istrie, au contraire !

 

village d'Oprtalj

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Motovun

La colline porte Motovun un peu comme une écharpe, motif enroulé dans le vert gris des arbres. La République de Venise s’était installée pour rester : murs et ouvrages de défense en témoignent encore. Ici et là, les blasons des anciennes familles à poigne. Des stands amovibles offrent fruits et légumes de saison sous les monuments médiévaux. L’atmosphère est coquette et aérée ; du XIVe au XVIIIe siècle, les moyens n’ont pas manqué à l’architecture, qui a pu faire étalage de son savoir-faire. Sur l’autre rive de la rivière Mirna, qui coule paisiblement en contrebas, un bois de chênes blancs fait la fierté de la municipalité. Non seulement, il se distingue dans le contexte karstique régional, mais encore la truffe, Tuber magnatum, y abonde. L’été, un festival transforme Motovun en rendez-vous mondial du cinéma indépendant. En somme, nature, vieilles pierres et esprit contemporain font bon ménage. L’escalier de plus de mille marches qui relie le pied de la colline à son top fait un lien concret entre ces divers aspects.

Motovun Istrie

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Hum

Qu’est-ce qu’une ville ? Une agglomération cohérente d’habitations et de services. Disons cela. Car cette question s’impose ici. Avec le nombre d’habitants d’un hameau, Hum est une ville. Petite. La plus petite disent les Croates. Et médiévale. Tout ce qui constitue une ville d’alors - église, tour de guet, municipalité - s’y trouve réuni sur un espace riquiqui : deux courtes rues parallèles. On fait rapidement le tour de la question. Non par désinvolture ou relâchement d’attention, au contraire, c’est construit bien et serré, mais par jeu. A l’heure des mégapoles aux prolongements interminables, la brièveté de Hum est un bonheur, on y entre et on en sort d’un même mouvement, ou presque. La belle nature d’Istrie se déploie autour. On la domine, puisque dans ces marches d’empire il fallait voir loin.

 

village de Hum

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Beram

Une colline du centre de la péninsule, avec en haut une église et son cercle de maisons de pierre à toits de tuiles, des ruelles ombreuses et des placettes ensoleillées. Encore ! Ils sont ravissants ces villages, mais là, on se répète un peu, non ? Ce pourrait être le cas, si Beram ne possédait un truc en plus : la chapelle Sainte-Marie-des-Ardoises, somptueusement décorée au XVe siècle par l’atelier de Vincent de Kastav. Adoration des mages, saint Martin partageant son manteau, scènes de la vie du Christ, la peinture donne un spectacle total. Auquel une danse macabre met une note de sagesse. Serrés de près par des squelettes bien pris dans leurs côtes, les personnages de la comédie sociale, du petit enfant au pape, s’acheminent vers le terme de toute vie humaine. Ce qui se fait sans effroi, avec plutôt une résignation intriguée. La danse macabre n’est pas triste. Le visiteur sort du sanctuaire tout ragaillardi. Et convaincu qu’il ne pouvait manquer Beram, dont le site est occupé sans discontinuité depuis l’âge du fer. Tout de même !

 

Beram Croatie

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Sveti Lovrec

Dans l’arrière-pays de Porec, bordé de champs de lavande, Sveti Lovrec twiste comme une coquille d’escargot. C’est une disposition qui remonte loin dans l’histoire, et même dans la préhistoire. On remarque néanmoins d’abord, la grande église paroissiale, dont saint Martin est le dédicataire, et le beffroi, les murs. Un ensemble de pierre blanche mouvementé qui impose immédiatement des images de gentes dames, de ménestrels et de chevaliers. De fait, une fois passée la porte monumentale, les voyageurs découvrent un petit bourg dont l’esprit médiéval ne se laisse pas éteindre par celui du XXIe siècle. Autos et scooters ont ici quelque chose d’incongru. Place centrale, pour échapper à la réverbération du soleil, il est agréable de se réfugier sous la loggia, qui a depuis des lustres abrité rassemblements et délibérations. Un peu plus frais, on reprend son exploration - dans le sens des aiguilles d’une montre - le long des ruelles parées de pendeloques de vigne.

 

Sveti Lovrec

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Brsec

Brsec domine de haut la baie de Kvarner. Le site vertigineux de ce village de la côte est le fait plus grand que nature. Il en fait aussi, pourvu que l’on descende au pied de la falaise, une occasion de baignade délicieuse. Dans une eau dont seule l’Adriatique a le secret : tiède, bleue Polynésie et littéralement cristalline. Brsec plage ne s’oublie pas. Le village-même offre donc de quoi contempler de haut ce dans quoi on s’est trempé. Pins et glycines accompagnent les balades. Des cafés recueillent les paresses passagères. Au fond, rien ne distingue cette fondation du XIVe siècle des autres. Et c’est bien ainsi. Il n’est pas nécessaire de se singulariser au point de n’être plus un village d’Istrie. La ressemblance contribue au plaisir, au confort, à la cohérence du voyage. Ici, on mange du poisson, et là, du jambon. Ici, natation, là, randonnée. Ces variations suffisent bien.

 

Brsec

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Bale

A treize kilomètres de Rovinj et vingt de Pula, il n’est pas impossible de considérer que Bale dispose d’importantes ressources extérieures. Cependant, à trop regarder ailleurs, le risque est grand de ne pas estimer Valle d’Istria à sa juste valeur. Maisons de calcaire blanc, ruelles dallées qu’enjambent des arcs en plein cintre, petites places tissent le charme des vieux villages de la péninsule. Au milieu de celui-ci, deux édifices se signalent à l’attention des voyageurs. Le palais Soardo Bembo, à cheval sur le Moyen Age et la Renaissance : une façade d’inspiration vénitienne qu’encadrent deux fortes tours carrées. Et l’église du Saint-Esprit - XVe siècle - d’apparence modeste, mais ornée d’un magnifique programme de fresques. Pour le reste, une vie qui prend son temps et un pittoresque qui est plus que la somme de ses parties, dans lequel on se perd avec bonheur, au point de ne s’y retrouver qu’à regret. Certains endroits vous font déplorer la loi imposant au voyageur de ne faire que passer.

 

Par

EMMANUEL BOUTAN

 

Photographie de couverture : twingomaniak/Getty Images/iStockphoto